La Semaine des métiers du nucléaire revient du 3 au 7 février. Projets de mini-réacteurs (SMR), construction de Réacteurs pressurisés européens (EPR)… le nucléaire regorge de projets. Dans ce mouvement, les besoins en compétences s’annoncent importants. Hélène Badia, Présidente de l’Université des Métiers du Nucléaire (UMN), à l’origine de cette initiative avec France Travail, revient sur les perspectives de la filière.
Pouvez-vous faire un tour d'horizon de la filière ?
La filière nucléaire en France est un secteur industriel majeur, représentant 220 000 emplois et plus de 3 000 entreprises, dont 85 % sont des TPE-PME. Elle est la troisième filière industrielle du pays, derrière l’automobile et l’aéronautique. Spécialité française : elle couvre l’ensemble de la chaîne de valeur du nucléaire, de l’extraction de l’uranium à la gestion des déchets et au démantèlement des installations.
Les principaux acteurs incluent Orano pour la reconversion de l’uranium, Framatome pour la production de gros composants, Arabelle pour les turbines et EDF pour la construction et l’exploitation des centrales. La filière est également active dans la recherche et développement, notamment avec des réacteurs de recherche du CEA.
Comment décririez-vous la situation actuelle de la filière nucléaire en France ?
Nous traversons une dynamique positive. C’est une période de relance, marquée par des annonces importantes telles que la prolongation de la durée de vie des centrales existantes, la construction de nouveaux réacteurs nucléaires et les projets de Small Modular Reactors (SMR). Le raccordement de Flamanville 3 au réseau et le démarrage des travaux pour les EPR 2 à Penly sont des exemples concrets de cette dynamique.
À l’échelle mondiale, 2025 s’annonce comme une année record pour la production d’électricité nucléaire, avec 63 réacteurs en construction, en plus des 420 existants.
Comment se traduit cette dynamique positive sur les besoins en compétences ?
Elle se traduit par un véritable regain d’attractivité, notamment auprès des jeunes et des personnes en reconversion. Ils sont attirés par des perspectives d’emploi à long terme et par la reconnaissance du rôle du nucléaire dans la transition énergétique et la souveraineté de notre pays. C’est une évolution bienvenue car sur les 10 prochaines années, les besoins en recrutement de la filière nucléaire s’élèvent à 10 000 personnes par an.
Par ailleurs, il s’agit de compétences variées, allant des métiers classiques comme les soudeurs, chaudronniers, dessinateur-projeteur et électriciens, aux compétences spécifiques liées à la construction et à l’ingénierie.
Voyez-vous émerger de nouveaux métiers au regard des nombreuses innovations technologiques du secteur ?
Nous ne voyons pas apparaître de nouveaux métiers mais plutôt un élargissement de la palette des compétences et des profils nécessaires au développement de la filière.
Les entreprises du nucléaire cherchent à attirer des profils plus diversifiés. Les projets de SMR, par exemple, nécessitent des compétences en ingénierie et des méthodes de travail différentes, adaptées aux start-ups comme aux grandes entreprises.
Attirer des profils diversifiés, c’est notamment l’objectif du Passeport nucléaire…
Le Passeport nucléaire est une initiative de l’UMN, qui vise à intégrer des modules de formation nucléaires dans des formations existantes, comme les bac pro chaudronnerie et les BTS électrotechnique. Après 1 an, le bilan est déjà très positif, avec 3 000 élèves formés grâce à ce dispositif. Plus de 100 établissements en France dispensent le Passeport nucléaire, il est notamment déployé dans les Pôles formation UIMM.
Ce programme permet non seulement de former les jeunes aux métiers du nucléaire, mais aussi de travailler avec des profils en reconversion professionnelle. Les immersions et les stages sont également proposés pour faire découvrir le nucléaire aux jeunes engagés dans le programme.
Cette 3ème édition de la Semaine des métiers du nucléaire est placée sous le signe de l’inclusion. Pourquoi ce choix ?
L’objectif est de promouvoir la diversité en attirant des profils sous-représentés, comme les femmes, les publics en reconversion, les jeunes des quartiers prioritaires, les seniors et les habitants des zones rurales. L’idée est aussi de casser les idées reçues. Souvent, les gens pensent que le nucléaire ne recrute que des experts et des ingénieurs. Mais ce n’est pas du tout le cas. Nous recrutons des profils allant du CAP au bac +5, et il est important de le faire savoir.
L’inclusion, c’est aussi un travail que nous menons au quotidien avec l’UIMM qui représente une part importante des entreprises du nucléaire, ainsi qu’avec l’association Women In Nuclear (WIN) notamment sous l’angle de la mixité.
Parmi les temps forts, on peut citer la conférence de presse de lancement le 23 janvier au Creusot, le "Chooz Time" dans les Ardennes, et la remise de bourses d'études, par exemple à des jeunes dans les Hauts-de-France. La semaine comprendra également des webinaires nationaux sur des thématiques variées et près de 400 événements tels que forums de recrutement, portes ouvertes, job datings, conférences et visites de sites industriels ou établissements de formation.
Retrouvez tous les évènements sur le site de France Travail et monavenirdanslenucleaire.fr
Hélène Badia, présidente de l'Université des métiers du nucléaire