Alexis de Clavière travaille au sein du cabinet Factorhy Avocats, spécialisé en droit social. Sa thèse portant sur l’exonération en droit social soutenue à l’Université Paris Panthéon Assas, sous la direction de Lydie Dauxerre, a été récompensée par le prix de Thèse en droit social de l’UIMM 2023. À travers cette distinction, le juriste souligne l’importance du droit social pour améliorer la compétitivité des entreprises.
Qu'est-ce qui vous a conduit à choisir le thème des exonérations en droit social pour votre thèse ?
À travers mes premières expériences en cabinet, j’ai constaté que la plupart des mesures de droit du travail ont immédiatement une traduction en matière de « coût du travail ». On l’observe en matière de durée du travail (exonération sur les heures supplémentaires), de rupture de contrat de travail (indemnités de rupture) ou des dispositifs de rémunération (épargne salariale), etc…
Or ce lien entre « mesures sociales » et « coût » est souvent mal appréhendé : les exonérations étant principalement étudiées sous un angle économique, avec peu de travaux juridiques offrant une vision d’ensemble.
J’ai voulu modestement participer à la construction doctrinale de la matière en démontrant que premièrement, on ne peut dissocier l’utilisation de la norme sociale de son coût pratique pour les entreprises, et que, deuxièmement, une fois appréhendés, ces dispositifs offrent une politique RH cohérente et efficace aux entreprises.
En quoi vos travaux enrichissent-ils la recherche et le quotidien des entreprises ?
Mes travaux s’inscrivent dans une double ambition : améliorer la compréhension des dispositifs d’exonération et renforcer leur efficacité pour les entreprises. Aujourd’hui, le système est complexe et souvent méconnu, ce qui empêche les entreprises d’en tirer pleinement parti. Par exemple, les annexes des projets de loi de financement de la sécurité sociale consacrées aux mesures d’exonération détaillent les mesures sur près de 100 pages. Une telle profusion nuit à leur accessibilité et leur utilisation optimale.
Dans le cadre de mon analyse, j’ai pu tirer quelques enseignements. Notamment, il est à mon sens préférable de « concentrer » les dispositifs et de privilégier des mesures générales, qui sont plus stables et efficaces. Également, la formule de calcul de la réduction générale de cotisations patronales pourrait tenir compte des minima conventionnels, afin de mieux mieux adapter les allègements aux réalités salariales des branches. Cela pourrait renforcer le rôle des partenaires sociaux de la branche, et leur permettre de la créer des solutions simples, utiles et adaptées aux besoins des entreprises.
Quel regard portez-vous sur votre discipline, le droit social ?
Le droit social, est souvent perçu à tort comme rigide. À mes yeux, le véritable frein n’est pas la rigidité du droit, mais réside plutôt dans la méconnaissance des normes car en réalité, le droit offre un espace d’innovation considérable. Depuis 2017, notamment, la négociation collective permet aux entreprises de construire un statut collectif personnalisé et adapté à leurs valeurs et à leurs ambitions, dans le respect des cadres légaux et conventionnels.
Lorsqu’il est bien compris et accompagné, le droit social devient un outil puissant pour répondre aux besoins spécifiques des entreprises. C’est une discipline riche et dynamique, qui conjugue créativité et pragmatisme.
Que représente pour vous le Prix de thèse de droit social de l’UIMM ?
Je suis évidemment très heureux de cette distinction, tant pour la reconnaissance de mon travail que pour l’accompagnement précieux de ma directrice de thèse. Ce prix est aussi une opportunité de mettre en lumière des sujets parfois peu connus et de les valoriser.
L’UIMM joue un rôle central dans la diffusion de doctrines et d’idées en matière de droit social. Ce prix permet ainsi d’amorcer des débats sur des questions fondamentales et d’y apporter des propositions constructives, ce qui était mon objectif premier.
Quels sont vos projets professionnels à la suite de cette thèse ?
À court terme, je souhaite poursuivre mon activité en cabinet, où j’accompagne les entreprises sur des problématiques de droit social. Ce rôle me permet d’être au plus près des réalités du terrain et de mettre en pratique mes connaissances.
À moyen ou long terme, j’aimerais reprendre en parallèle une activité d’enseignement, que j’ai eue l’occasion de découvrir pendant ma thèse. Enseigner permet de transmettre, mais aussi de prendre du recul et d’approfondir les réflexions sur des sujets de fond.
Ce double équilibre entre conseil et pédagogie me semble particulièrement enrichissant, tant pour les entreprises que pour moi-même.
Alexis de Clavière et Matthieu Vicente, lauréats du Prix de thèse de droit social UIMM 2023