Maître de conférences en droit privé à l’Université d’Orléans, Clément Duchemin s’est distingué par ses travaux de recherche en droit social. Sa thèse, consacrée aux interactions entre le droit du travail et le régime général des obligations, a été soutenue à l’Université Paris Panthéon-Assas sous la direction du professeur Patrick Morvan et a reçu le Prix de thèse en droit social de l’UIMM 2024. Il met en lumière la richesse du droit social, au carrefour des dimensions économiques, patrimoniales, mais aussi humaines.
Qu'est-ce qui vous a conduit à choisir le thème de l’application du régime général des obligations en droit du travail pour votre thèse ?
Mon choix s’est construit autour de deux motivations principales. D’abord, je souhaitais explorer un angle encore peu étudié : si les relations entre le droit du travail et le droit civil des contrats ou de la responsabilité ont été abondamment explorées, aucune étude d’ensemble ne s’était encore consacrée aux interactions entre le droit du travail et le régime général des obligations. Ensuite, la réforme de 2016 du droit des obligations a introduit des innovations majeures dans le Code civil, ce qui m’a semblé être une opportunité pour analyser leurs effets en droit social, une matière qui ne cesse de se renouveler.
En quoi vos travaux enrichissent-ils la recherche et le quotidien des entreprises ?
Mes travaux montrent que certaines techniques issues du régime général des obligations sont, en réalité, pleinement opérationnelles en droit du travail, sans qu’une transposition spécifique ne soit toujours nécessaire. Ces outils permettent d’apporter des solutions directes à des problématiques courantes des entreprises, tout en créant de nouvelles marges de manœuvre. Par exemple, le droit des opérations à trois personnes trouve des applications pertinentes en droit social, notamment dans le cadre de la mobilité des salariés. En somme, ma thèse propose des solutions pratiques pour mieux articuler le droit spécial du travail avec le droit commun et répondre en partie aux incertitudes juridiques auxquelles sont confrontées les entreprises.
Quel regard portez-vous sur les évolutions du droit en France et plus spécifiquement sur le droit social ?
Le droit évolue aujourd’hui dans un contexte de complexité croissante et de transformations sociales accélérées, notamment sous l’effet des avancées technologiques, de la mondialisation ou encore des enjeux climatiques. Cela engendre inévitablement une augmentation du besoin de régulation, et donc une production législative plus intense. On entend souvent des critiques sur la supposée « bavardise » du droit ou sa qualité rédactionnelle parfois perfectible, mais cette prolifération est aussi le reflet de la nécessité de s’adapter à un monde toujours plus complexe.
Concernant le droit social, c’est une discipline extrêmement riche. Elle mêle des dimensions économiques, patrimoniales, mais aussi humaines, en veillant à protéger les salariés dans leurs conditions de travail et leur sécurité. C’est une matière qui dépasse les frontières classiques du législatif et du contractuel, notamment grâce à son volet collectif. Cette diversité en fait une discipline profondément ancrée dans la réalité du monde du travail, mais aussi une matière vivante et en perpétuelle évolution. C’est un domaine fascinant à explorer.
Que représente pour vous le Prix de thèse de droit social de l’UIMM ?
Ce prix est avant tout une belle reconnaissance du travail accompli pendant ces années de recherche. Mais au-delà de l’aspect personnel, il met aussi en lumière l’utilité pratique de mes travaux pour les entreprises et les praticiens. Cela me tient particulièrement à cœur, car le droit social est une discipline concrète, tournée vers les enjeux du terrain. Ce prix montre que mes recherches peuvent avoir un réel impact dans le monde professionnel.
Quels sont vos projets professionnels à la suite de cette thèse ?
J’ai à cœur de poursuivre ma carrière dans l’enseignement et la recherche, mais toujours en restant connecté aux besoins des praticiens du droit. Le dialogue avec les professionnels est essentiel pour rester en phase avec les problématiques concrètes auxquelles ils sont confrontés. Mes projets vont donc dans cette direction : un équilibre entre la réflexion académique et l’application pratique des solutions juridiques.