Au cours des dernières années, la croissance française a surtout été stimulée par les investissements des entreprises. Au-delà de leur nécessaire développement à moyen terme lié à des motivations d’ordre économique et environnemental (modernisation du parc, économies d’énergie, mutations dans le secteur automobile), ceux-ci devraient se montrer moins vigoureux en 2020.
Entre l’été 2016 et l’été 2019, le volume du PIB français s’est raffermi de 5,8 %. Pendant ce temps, les investissements réalisés par l’ensemble des agents économiques (ménages, entreprises et administrations publiques) ont bondi de 12,6 %. Dit autrement, ces derniers ont contribué pour près de la moitié à la croissance économique, alors qu’ils ne représentent que 23 % de la richesse nationale ; les seules dépenses des entreprises ont contribué à hauteur d’un tiers pour un poids de 14 %, c’est-à-dire quasiment autant que la consommation des ménages dont la part s’élève elle à 52 %.
La vigueur des investissements productifs a au moins deux origines, à commencer par la faiblesse récurrente des taux d’emprunt elle-même liée à une politique monétaire des plus accommodantes : selon les statistiques compilées par la Banque de France, le taux moyen appliqué par les banques pour financer un bien d’équipement a touché un nouveau point bas historique à 1,27 % en moyenne au troisième trimestre 2019 contre 1,9 % au début 2016 et 3 % au printemps 2013. Deuxièmement, les marges d’exploitation des sociétés non financières ont augmenté de plus de 8 % en euros courants l’an passé après + 1,3 % en 2018, en large partie en raison de la concomitance transitoire de l’allègement des cotisations employeurs et du CICE (celui-ci a été versé au titre de l’exercice 2018 mais enregistré en 2019 par les comptables nationaux).
Selon une enquête menée par l’Insee en octobre dernier, les investissements opérés par les entreprises du secteur industriel auraient augmenté de 4 % en valeur en 2019, cadence similaire à celle constatée en 2018. Le mouvement a sans doute été positif pour chacun des trois grands postes de dépense : biens manufacturés, construction, R&D.
L’embellie pourrait cependant s’arrêter là, les industriels anticipant un reflux de 0,5 % de leurs investissements en 2020. L’affaissement progressif du climat des affaires lié à la montée des incertitudes de nature économique- l’OCDE rappelle que, à l’échelle mondiale, c’est désormais la première préoccupation des entreprises devant les pénuries de main d’œuvre et les politiques publiques- finira donc par produire ses effets sur les dépenses en capital fixe réalisées par ces dernières. De surcroît, les tensions sur l’appareil productif apparaissent moins prégnantes, comme en témoigne le repli de 3 points du taux d’utilisation des capacités depuis son pic du début 2018, revenu sur sa moyenne des quatre dernières décennies. A l’échelle des entreprises de tous les secteurs de l’économie (y compris de la construction et des services) l’investissement productif poursuivrait sa marche en avant mais à un rythme deux fois moindre : l’institut Rexecode envisage + 2,1 % en volume pour cette année, après + 4,1 % en 2019.